« L’Église apostolique albanaise est l’une des plus anciennes églises du Caucase, pilier de la culture antique et médiévale de l’Azerbaïdjan. Le christianisme, l’une des religions abrahamiques originaires des territoires palestiniens au premier siècle de notre ère, s’est répandu en l’an 56 après J.-C. dans l’Albanie du Caucase, l’un des anciens États d’Azerbaïdjan, par Saint Élisée, disciple de l’apôtre Faddey (Judas). L’historien albanais, Movses Kaghankatvatsi, a écrit à propos de la prédication de Saint Élisée : « Saint Élisée est venu en Iran de Jérusalem. Il traversa l’Arménie (Arménie d’Arsacides dans la région de l’Euphrate – ed.), visita les Muskuts et commença ses sermons à Chola (au sud du col de Derbent, à peu près jusqu’au mont Bechbarmag, qui couvre la bande côtière Caspienne). De là, il passa dans la province d’Uti. Saint Élisée est venu à Guis (Kish – ed.), où il a fondé l’église ».
Ainsi, M. Kaghankatvatsi montre que l’Église apostolique albanaise est la plus ancienne église du Caucase. Cette idée est confirmée par le Catholicos arménien Abraham, qui a vécu au VIe siècle. Dans sa lettre aux Albanais, il indiquait : « Saint Élisée a prêché le christianisme en Albanie et a construit une église en Albanie, plus précisément dans le village de Guis, avant l’Arménie ». Dès le début du Moyen Âge, cette couche socioculturelle est entrée dans la sphère multiculturelle de l’Azerbaïdjan et, dans les trente premières années du IVe siècle, le souverain de l’Albanie du Caucase, Ourhnayr II, a déclaré le christianisme comme religion d’État. La première résidence de l’Église apostolique albanaise fut établie à Chola, et à partir de la seconde moitié du Ve siècle, à Partaw (l’actuelle Barda).
À partir des Ier et IIe siècles de notre ère, les églises albanaises couvraient les terres azerbaïdjanaises en un dense réseau, et des monuments chrétiens albanais ont commencé à être construits au Karabakh, à Sheki et à Gakh-Balakan. Pendant cette période, des églises et des monastères ont été édifiés à Zangazour et à Irevan. Parmi eux, Uchkilsa (temple des Anges Bleus dans le district de Karbibasar), Sivang (dans le district de Goycha), Tatev (dans le district de Zangazour), Uzunlar (dans le district de Talin), Aselishad-Khorvirab (dans le district de Vedibasar), Avan et Putgni (dans le district de Kirkhbulag), Gamarli (dans le district d’Ashtarak) et Piragan, constituent des spécimens uniques du patrimoine azerbaïdjanais.
De nouvelles approches théologiques sont apparues dans le monde chrétien du début du Ve siècle, qui ont divisé l’Église chrétienne en un certain nombre de doctrines. Jusqu’à la fin du Ve siècle, l’Église apostolique albanaise, qui était chalcédonienne, s’est éloignée du dyophysisme1, car elle a été contrainte de se soumettre à la politique confessionnelle des empereurs sassanides de la région. Ces querelles sectaires ont duré plus d’un siècle, et la situation socio-politique de la région à la fin du VIIe siècle l’a finalement conduite au monophysisme2.
Au début du VIIIe siècle, l’Église apostolique albanaise, qui voyait ainsi le moyen de se débarrasser de la domination du califat arabe dans l’Empire byzantin, a voulu revenir au dyophysisme et a fait face à l’insidiosité de l’Église arménienne grégorienne.
Ainsi, les Arméniens, qui ont perdu leur statut d’État depuis le début du Moyen Âge se sont dispersés dans une vaste zone, à la recherche de nouvelles terres : de la Mésopotamie à l’Anatolie orientale (province de Kars), et jusqu’à la Cilicie (région méditerranéenne).
Lors de sa quête d’une « patrie », l’Église arménienne grégorienne, qui cimentait les Arméniens autour d’elle, a commencé à revendiquer des monuments chrétiens qui faisaient partie du patrimoine matériel et culturel de l’Azerbaïdjan.
Cette Église monophysite a tenté de faire oublier le fait que l’Église arménienne grégorienne, fondée par le Parthe Grégoire, a vu le jour dans le village d’Ashtishat, sur les rives de la rivière Arasani (affluent de l’Euphrate), dans la province de Taron (région de Mush), dans la partie orientale de l’Asie Mineure. Cela n’avait rien à voir avec la région du Caucase, ni même avec le patrimoine matériel et culturel de l’Azerbaïdjan. Pourtant, l’Église arménienne grégorienne, qui s’appuie sur de véritables mensonges historiques et qui cherche une « patrie » pour sa petite communauté, va instrumentaliser la politique confessionnelle du califat arabe. En 704, le Catholicos Elijah écrit une lettre au calife Abd al-Malik où il accuse le Catholicos albanais Nerses Bakuru de trahison contre le califat. En conséquence, l’Église apostolique albanaise perd son autocéphalie (indépendance juridique et spirituelle – NDLR) et, par décision du concile de Barda en 704, l’Église apostolique albanaise est placée sous la même autorité que l’Église arménienne grégorienne. Depuis le début du VIIIe siècle, la résidence de l’Église apostolique albanaise est située à Berdakur, sur les rives de la rivière Tartar (sur le territoire de Tartar, province de Kalbajar). A la fin du IXe siècle, l’Église apostolique albanaise désobéit à la décision du concile de Barda. À partir du milieu du Xe siècle, l’Église apostolique albanaise se convertit à la doctrine dyophysite et cela durera 17 ans. Revenant au monophysite dans la seconde moitié du Xe siècle, l’Église apostolique albanaise restaure son autocéphalie au milieu du XIIIe siècle et le monastère de Ganjasar3 devient alors la résidence de l’Église apostolique albanaise. Le temple a été construit en 1216-1238 sur ordre du prince Hassan Jalal4, un représentant de la dynastie Mihranide, l’un des souverains de Khatchen, prince d’Albanie du Caucase.
Cependant, la trahison arménienne continue de poursuivre l’Église apostolique albanaise. Ainsi, à partir du Moyen Âge, l’Église arménienne grégorienne commence à s’approprier des terres à Irevan appartenant à la population indigène, les Azerbaïdjanais, scellant ainsi (dès le XVe siècle) les bases des revendications arméniennes infondées sur le patrimoine matériel et culturel de l’Église apostolique albanaise et plus tard sur les terres azerbaïdjanaises. De la sorte, en 1441, l’Église arménienne grégorienne, qui a déplacé sa résidence de Sis à Uchkilsa, commence à s’emparer des terres de Irevan.
Ce processus a commencé avant même les événements de 1441. En 1431, le Catholicos Grigor Makulu a acheté, pour 530 000 dinars de Tabriz, sept villages de la région de Irevan : le village d’Uchkilsa (où se trouve le monastère d’Uchkilsa), les villages de Gamarli, Batrinj, Noragavit, Agunatun, Kirajli et Mugni, qu’il a rattachés au monastère d’Uchkilsa. Plus tard, l’Église arménienne grégorienne saisit seize autres villages azerbaïdjanais, d’autres terres, d’autres biens. De cette manière, l’Église arménienne grégorienne a pu créer de nouvelles colonies arméniennes sur des terres azerbaïdjanaises, et cette église monophysite a commencé à installer sa communauté nomade sur une terre historique d’Azerbaïdjan, Irevan.
Dès lors, les Catholicos de l’Église arménienne grégorienne, prennent l’habitude de s’offrir les terres historiques azerbaïdjanaises autour du monastère d’Uchkilsa et de les annexer au monastère. Ce processus se poursuit jusqu’au XVIe siècle, quand Beglerbek de Chukhur-saad Ravangulu Khan en a décèle le danger. En 1519, dans une lettre au souverain safavide Shah Ismaïl, il écrit : « … Ces dernières années, les Arméniens de Méditerranée (Ikichayarasy – éd.), sont venus sur nos terres, sur les rives du lac de Van et de là au Caucase. Au lieu de gagner leur vie par les affaires, le petit commerce, la construction et la menuiserie, ils se sont engagés dans la revendication d’une vie sédentaire étendue sur les terres qui sont sous ma suzeraina-eté. Le Catholicos des Arméniens du Monde, qui vit maintenant dans le village d’Uchkilsa, a rendu notre administration difficile avec ses activités et ses actions provocatrices qui ne sont pas représentatives de Grégoire II. Le Catholicos finance l’installation de deux ou trois familles à la périphérie des villages azerbaïdjanais, avec l’aide de la fondation du Centre religieux arménien, leur construisant de petites églises, donnant ainsi l’impression d’ancienneté de l’existence de la tribu dans le Caucase, ce qui pourrait entraîner, à l’avenir, des complications. »
Ravangulu khan ne s’est pas trompé dans ses prédictions. L’Église arménienne grégorienne, qui cherche de nouveaux territoires pour la communauté arménienne sans abri, se concentre sur les terres azerbaïdjanaises depuis le Moyen Âge, dans le but de mettre la main sur l’Église apostolique albanaise, patrimoine matériel et culturel de l’Azerbaïdjan. L’Église arménienne grégorienne a poursuivi cette politique pendant des siècles, convaincue que, après l’occupation des terres azerbaïdjanaises au nord de l’Araz par l’Empire russe dans les trente premières années du XIXe siècle, les conditions propices étaient créées pour inventer la « Grande Arménie ». Elle a réussi à convaincre la Russie que ses partisans formeraient la base sociale du pouvoir politique de l’Empire dans la région, dans le but de prendre possession du patrimoine de l’Église apostolique albanaise. Elle a ainsi réussi à convaincre l’empereur Nicolas Ier de signer, le 11 mars 1836, un décret aux termes duquel la gestion de l’Église apostolique albanaise autocéphale était confié à l’Église arménienne grégorienne.
Après que le contrôle du patrimoine matériel et culturel de l’Église apostolique albanaise soit passé à l’Église arménienne grégorienne, le terrain était favorable pour que les nationalistes arméniens puissent émettre des revendications sans fondement sur les terres historiques de l’Azerbaïdjan. Parallèlement, avec la permission des autorités russes, l’Église arménienne grégorienne, détruisit les archives de l’Église apostolique albanaise en 1909-1910, portant ainsi un grand coup au patrimoine historique de l’Azerbaïdjan et à la mémoire historique de son peuple.
L’Église arménienne grégorienne, en tandem avec les partis nationalistes arméniens, put ainsi, au début du XXe siècle, revendiquer sans vergogne les terres historiques d’Azerbaïdjan et inventer le soi-disant « problème du Haut-Karabakh » et arméniser totalement Irevan, alors qu’elle n’a, historiquement, strictement rien à voir avec le Caucase.
Views: 201