Le site catholique « Acistampa » a publié une interview avec Rahman Mustafayev, ambassadeur d’Azerbaïdjan auprès du Saint-Siège. L’AZERTAC présidente le texte intégral de cette interview :
- Monsieur l’Ambassadeur, depuis les affrontements armés de juillet à la frontière entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan, il s’est écoulé plus d’un mois. Quelle est la présente situation dans votre région ?
- La provocation armée de juillet de l'Arménie dans la région azerbaïdjanaise de Tovuz a porté un coup dur au processus de paix en cours sur le règlement du conflit du Haut-Karabagh entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan et elle a sapé notre confiance dans le Groupe de l'OSCE de Minsk et en ses coprésidents. Mais nous devons aller de l’avant et, dans ce contexte, nous saluons la déclaration du 19 juillet du Pape, dans laquelle il a exprimé l’espoir « qu’avec la participation active de la communauté internationale, avec le dialogue et la bonne volonté des parties au conflit, nous serons en mesure de parvenir à trouver une solution pacifique durable à ce conflit ». C'est une déclaration très équilibrée et constructive du chef de l'Église catholique, et il est de la plus haute importance de stimuler le processus de paix. Répondant à cet appel du Pontife, l'Azerbaïdjan a réaffirmé sa position en faveur d’un processus de négociation de fond sur le règlement du conflit arméno-azerbaïdjanais.
- Quelle serait à vos yeux « une solution pacifique et durable » de ce conflit ?
- Le cadre juridique et politique du règlement a été défini dans les résolutions du Conseil de sécurité de l'ONU de 1993, ainsi que dans les décisions ultérieures de l'OSCE, principalement celle du Sommet de l'OSCE à Budapest en décembre 1994. Il s'agit d'une approche par étapes, selon laquelle, tout d'abord, il convient d'éliminer les principales conséquences du conflit. En d’autres termes, le retrait immédiat, complet et inconditionnel des forces armées arméniennes de tous les territoires occupés de l’Azerbaïdjan doit être réalisé. La deuxième étape est le retour de la population azerbaïdjanaise expulsée dans ces territoires. En outre il faudra restaurer les communications et des liens détruits entre les deux communautés du Haut-Karabagh, arménienne et azerbaïdjanaise, et garantir le développement économique des régions qui ont souffert de l'occupation. Enfin, la dernière étape sera l’élaboration du statut du Haut-Karabagh, qui devra avoir lieu avec la participation directe, pleine et égale, de la communauté azerbaïdjanaise du Haut-Karabakh.
- La question du statut du Haut-Karabagh est la plus lourde. La partie arménienne met l’accent sur l’autodétermination et vous sur le maintien de l’intégrité territoriale de l’Azerbaïdjan. Ces deux approches sont-elles compatibles ?
- Malheureusement, la partie arménienne interprète arbitrairement, « selon son goût », le principe de l'autodétermination. Mais le système du droit international n'est pas un menu de restaurant à partir duquel vous pouvez choisir ce que vous aimez « à votre goût ». C'est un système holistique dans lequel tous les principes sont interconnectés, se renforcent les uns les autres et sont appelés ensemble à nous protéger des catastrophes humanitaires, des violations des Droits de l'Homme et des actes d'agression.
Par conséquent, en réponse à votre question, je dirai que, premièrement, le peuple arménien a déjà réalisé son droit à l'autodétermination et a créé son propre État indépendant en 1991. Deuxièmement, la Déclaration sur les principes du droit international, qui a été adoptée par l'Assemblée générale des Nations Unies le 24 octobre 1970, est devenue le fondement de l'Acte final d'Helsinki de 1975, qui stipule que le principe de l'autodétermination des peuples « ne doit pas être interprété comme un encouragement à des actes qui conduiraient au démembrement ou à la violation de l'intégrité territoriale des États souverains et indépendants ».
En outre, dans cette Déclaration de l'Assemblée générale des Nations Unies, dans les commentaires sur le principe d'autodétermination, il est mentionné que « tout État doit s'abstenir de toute action tendant à violer partiellement ou totalement l'intégrité territoriale de tout autre État ».
- Dans le contexte du règlement du conflit apparait souvent la question des Droits de l’Homme. Cela vous semble-t-il justifié ?
- Bien entendu. Comme il ressort de la Déclaration universelle des Droits de l'Homme et d'autres instruments juridiques internationaux, l’exercice d’un droit légal ne peut pas procéder d'un acte illégal. En d'autres termes, la réalisation de ses droits et libertés pour un groupe national est incompatible avec la violation des droits et libertés d'autres groupes nationaux. À cet égard, permettez-moi de vous rappeler que près de 700 000 Azerbaïdjanais, Russes, Kurdes ont été expulsés des 7 régions occupées voisines du Haut-Karabagh en 1992-1993. De plus, 40 000 Azerbaïdjanais ont été expulsés du Haut-Karabagh, représentant plus de 20% de la population de cette région au début du conflit en 1988. Tous ces réfugiés ont des droits et des libertés et doivent être réintégrés dans leurs droits.
En d'autres termes, notre position sur la garantie de l'intégrité territoriale de l'Azerbaïdjan et sur l'autodétermination du Haut-Karabagh dans sa composition initiale, la protection des droits et libertés de ses deux communautés, arménienne et azerbaïdjanaise, est fondée sur un cadre juridique international clair. Mais une base solide ne suffit pas pour avancer. Nous avons besoin, comme le Pape l'a évoqué à juste titre, de la participation active de la communauté internationale et de la bonne volonté des parties au conflit.
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